Le meurtrier

Le meurtrier

Acrylique et pastel sur panneau bois, 144 x 106 cm

Tout ce qui pouvait arriver de pire était déjà là. L’océan était trop vaste pour ne pas s’égarer. Il avait vu son père embarquer sur le petit bateau de pêche et il ne l’avait jamais revu. Le père était mort dans l’eau salée et l’enfance du fils dans l’étroite famille était broyée. Le fils ressentait une souffrance épouvantable. Des périodes d’internement l’avaient mis dans un état d’animal taré et violent. À l’intérieur de son corps se répandaient des envies écœurantes et dans sa tête des revanches cruelles. Il n’avait plus que des pulsions féroces. Avec l’usage de l’autre il pensait se libérer du deuil de son père et un jour, dans un brouillard angélique, il avait croisé un petit personnage qui fut la proie de sa grande folie. Il l’avait étranglé dans l’herbe humide et le petit corps dénudé avait été précipité du haut d’une lugubre falaise dans l’océan houleux. Le meurtrier poussait des hurlements de joie.

Au tribunal, un jeune avocat s’était approprié cette affaire à fort retentissement. Il déclamait en se frappant la poitrine avec ses mains blanches et palpitantes : « l’adversité était tombée sur la modeste famille, il y avait le père avec sa barque de pêche et puis cette grande vague d’eau glacée…brrr…! » L’avocat général s’était lissé la chevelure et il s’adressait au juge qui était recouvert de poussière : « Il se rendait chez des prostitué(e)s, il exigeait une sexualité obscène et il frappait sa mère, chez cet homme le diable se délecte à l’intérieur ! »

Sur le parvis du tribunal des groupes s’affrontaient avec des pancartes brandies : « la solution, la castration ! » ou bien : « on tue la marine et les petits bateaux ! »

Toi qui regardes la télé toute la journée, ne confonds pas l’étrangeté de mon récit avec la réalité de tes émissions policières.