L’homme au trident
Feutre et acrylique sur papier, 40 x 30 cm
Dans nos froides contrées profondément germanisées, sans que nous en doutons et par temps humide, l’homme au trident revient régulièrement. Hâtons-nous mon frère et préparons-nous à accueillir chaleureusement l’homme au trident. A travers les ombres de nos sombres forêts, nous apercevons ce beau vagabond à la fine élocution. Nous sommes de simples cervidés, de pauvres ruminants et nous portons des bois plusieurs fois recourbés. Nous sommes séduits par ce beau parleur avec ses cascades de mots enchanteurs. Il nous apprend l’histoire des peuples maritimes, il nous raconte le soleil, les trésors cachés et les merveilles. Il nous enveloppe de ses palpitantes étreintes et il faut continuer à prêter l’oreille. Nous croyons tout ceci parce que c’est lui qui le dit. Rien ne bouge dans notre forêt émaillée de vert et de givre mais il semble qu’un soleil souverain traverse en rayons éclatants les branches des sapins. Nous nous sentons comme exposés à l’action d’une grosse chaleur et tout ce que nous vivons entre dans nos cœurs. Nous lui embrassons les mains avec des larmes sur nos paupières et nous sanglotons face à sa radieuse lumière. Il brille pour nous comme une verge fière et déjà il explique tout ce qu’il faut faire. Il semble que les astres lui obéissent et sur cette terre mouillée nos genoux fléchissent. Il caresse notre pelage allant du fauve clair au marron foncé mais nous ne nous sentons point menacés. Ainsi la ruse permet au charmeur de s’emparer des êtres forestiers et en conclusion, il est révélé que dans la vie, par les gros menteurs, tout est réglé.
L’homme au trident marche et nage même s’il ne possède pas de nageoires. Il se tient droit et son port est majestueux. Sa main est faite pour se saisir du trident mais c’est avec le reste du corps que nous avons le plus de ressemblance et la différence n’est pas très grande.